Dans une décision du 21 janvier 2022, le Tribunal judiciaire Paris a retenu que le slogan « Rien à faire, c’est la MAAF que je/qu’il préfère » ne constituait ni un acte de contrefaçon, ni des agissements parasitaires.
Contexte : l’allégation d’une reprise non autorisée d’une chanson par un slogan publicitaire
La société d’édition musicale titulaire des droits sur la chanson « C’est la ouate » à, par contrat, consenti à l’ancien agent publicitaire d’une célèbre société d’assurance mutuelle française, l’autorisation d’adapter la chanson à des fins publicitaires.
Ce contrat pris fin en mars 2019.
Or, considérant que la compagnie d’assurance continuait d’exploiter la chanson litigieuse dans le cadre d’une nouvelle campagne publicitaire, avec les adaptations non autorisées du refrain de l’œuvre suivantes « Rien à faire, c’est la MAAF qu’il/elle préfère » et « Rien à faire, c’est la MAAF que je préfère », le compositeur de la chanson, les co-auteurs, ainsi que la société d’édition musicale ont assigné la compagnie d’assurance en contrefaçon de droits d’auteur et parasitisme, et ce malgré l’absence de reprise de la mélodie.
Solution : les qualifications de contrefaçon et d’acte parasitaire écartées du fait de l’absence de reprise de la mélodie dans le slogan
Par une décision du 21 janvier 2022, le Tribunal judiciaire de Paris énonce tout d’abord que seule doit être appréciée l’originalité de la phrase chantée « de toutes les matières c’est la ouate que je préfère », qui fonde de l’action en contrefaçon, et non la chanson dans son entièreté. Pour retenir le caractère original de cette phrase chantée, la juridiction retient ensuite que si le verbe « préférer » est couramment utilisé par les auteurs de chansons, la combinaison de la phrase litigieuse avec la mélodie de la chanson dont elle est extraite elle protégeable au titre du droit d’auteur.
Une fois ce préalable observé, le Tribunal écarte toutefois la qualification de contrefaçon. Pour ce faire, il retient que :
- la mélodie qui accompagnait précédemment la phrase dont l’utilisation avait été autorisée par les demandeurs (« Efficace et pas cher c’est la MAAF que je préfère…c’est la MAAF ») n’avait pas été reprise dans la nouvelle campagne publicitaire ;
- seule la chute de la phrase avait été conservée (le verbe préférer conjuguer à la première ou à la 3e personne du singulier).
En outre, le Tribunal judiciaire de Paris écarte également la qualification d’acte parasitaire. Pour cela, la juridiction retient que :
- si la valeur économique de la phrase chantée est reconnue, celle-ci ayant fait l’objet d’une autorisation d’utilisation d’une durée de 16 ans contre le paiement d’une somme forfaitaire, ce slogan seul ne peut, en l’absence d’association avec la mélodie, être considéré comme une valeur économique attribuable aux auteurs de la chanson, ces derniers ne pouvant exiger se voir reconnaître un monopole sur les termes « c’est là … qu’elle préfère » ;
- au regard des campagnes publicitaires massives, la notoriété de ce slogan est le fruit des propres investissements de la défenderesse et non de ceux des auteurs;
- le changement d’univers opéré dans la campagne publicitaire de la défenderesse traduisait la recherche d’un nouveau positionnement et donc l’absence de volonté de cette dernière de se mettre dans le sillage de la chanson « C’est la ouate ».
Résumé :
Lorsque la notoriété d’un slogan, issu d’une adaptation autorisée d’une chanson, est née grâce aux investissements publicitaires massifs de l’annonceur, sa valeur économique est imputable à l’annonceur, et non aux auteurs de cette chanson. Dès lors, la volonté de l’annonceur de maintenir un lien entre ses campagnes publicitaires, par l’utilisation d’un nouveau slogan exempt de la mélodie de cette chanson ne constitue pas un acte de parasitisme.
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