L’opposition contre la marque WELCOME jugée BIENVENUE

Avocat droit des marques NantesDans une décision du 20 décembre 2024, la Cour d’appel de Paris s’est prononcée sur la question de savoir s’il existait un risque de confusion entre le signe WELCOME et le signe antérieur BIENVENUE.

 

Contexte : opposition entre les signes WELCOME et BIENVENUE

 

Dans cette affaire, le titulaire de la marque antérieure BIENVENUE, déposée pour des produits cosmétiques et lavants, a formé opposition contre la demande d’enregistrement de la marque WELCOME, déposée en partie pour les mêmes produits. Le directeur général de l’INPI a, par décision du 19 juillet 2023, fait partiellement droit à ses demandes et a rejeté en conséquence la demande d’enregistrement pour lesdits produits.

Insatisfait de la décision de l’INPI, le déposant a interjeté appel de cette dernière.

 

Solution : la ressemblance conceptuelle des signes en cause l’emporte sur les différences phonétiques et visuelles

 

Le débat sur les preuves d’usage sérieux et la similitude des produits

 

Après des développements conséquents sur la preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure pour les produits en cause, la Cour a commencé par rappeler qu’il n’est pas nécessaire, pour que l’usage sérieux soit caractérisé, que celui-ci soit quantitativement important tant qu’est démontrée une exploitation commerciale effective du signe pour les produits visés. Elle a ensuite retenu en l’espèce que les factures versées aux débats (notamment) témoignaient d’une constance dans l’exploitation de la marque dans des volumes suffisants.

Pour opérer ensuite son appréciation du risque de confusion entre les marques, la Cour s’est penchée sur la comparaison des produits litigieux. Le déposant contestait la similitude entre les « crèmes cosmétiques ; nécessaires de cosmétiques ; maquillage » de sa demande d’enregistrement et les « cosmétiques, shampooings, lotions pour cheveux et corps, crèmes de beauté, savons, à savoir savons pour le corps » de la marque antérieure.

Or, la Cour a retenu l’identité, ou à tout le moins la similitude, de ces produits, considérant qu’ils sont de même nature (industrie de la cosmétologie), de mêmes fonctions et de mêmes destinations (même public cible à savoir les personnes désireuses de prendre soin d’elles, mêmes circuits de distribution).

 

La similitude des signes sur le plan conceptuel  

 

La Cour a ensuite examiné la similitude des signes en cause. Le déposant soutenait que les termes WELCOME / BIENVENUE présentaient des différences visuelles et phonétiques telles qu’elles excluaient tout risque de confusion entre eux, le public français étant d’un niveau d’anglais assez faible et ne pouvant faire de rapprochement entre ces deux mots.

La Cour, bien qu’elle admette dans un premier temps qu’il existe des différences visuelles et phonétiques entre les signes, a toutefois considéré dans un second temps que, sur le plan conceptuel, ceux-ci avaient la même signification puisque WELCOME est la traduction littérale de BIENVENUE en anglais, ce que ne peut ignorer le grand public qui a les notions élémentaires d’anglais. Elle a ainsi estimé qu’il serait à même de lui redonner « immédiatement et sans efforts de recherche ou d’interprétation sa signification de ‘bienvenue’ ».

En conséquence, les juges ont débouté l’appelant et conclu à l’existence d’un risque de confusion entre les marques, les consommateurs pouvant être amenés à établir un lien entre les deux sociétés titulaires.

 

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Données personnelles : accès et excès

Avocat rgpdDans une décision du 9 janvier 2025 (C-416/23), la Cour de Justice de l’Union Européenne a été amenée à répondre à des questions préjudicielles sur le caractère excessif de réclamations formées auprès d’autorités de contrôles de données personnelles.

 

Contexte : de nombreuses réclamations soulevées auprès de l’autorité de contrôle autrichienne

 

Une personne autrichienne, manifestement procédurière en matière de données personnelles, contactait régulièrement des responsables de traitements pour solliciter un accès à ses données personnelles traitées, comme cela lui est permis par le RGPD.

Lors de refus ou d’absence de réponse de la part du responsable concerné, elle soumettait une réclamation à l’autorité de contrôle autrichienne (la DSB).

Cette dernière avait fini par refuser de donner suite à une réclamation, estimant qu’elle avait un caractère excessif : l’autorité indiquait notamment que la personne en question lui avait adressé près de 80 réclamations similaires à l’encontre de divers responsables de traitements dans un intervalle de 20 mois.

L’article 57 du RGPD laisse en effet la possibilité aux autorités de contrôle de refuser de donner suite à une réclamation (selon le même régime que pour les responsables de traitement) lorsque les demandes « sont manifestement infondées excessive, en raison, notamment, de leur caractère répétitif ».

Le tribunal fédéral administratif autrichien a annulé la décision de la DSB, considérant en substance que le caractère excessif d’une demande, supposait une répétition fréquente des demandes mais aussi un caractère manifestement vexatoire ou abusif de celles-ci.

Saisi par la DSB d’un recours en révision, la Cour administrative autrichienne a posé à la Cour de Justice de l’Union Européenne trois questions préjudicielles.

 

Solution : un nombre élevé de réclamations, critère insuffisant pour ne pas y donner suite

 

1/ L’insuffisance du caractère répété des demandes

 

La Cour de Justice, répondant à la première question, rappelle tout d’abord que les réclamations formées auprès d’une autorité de contrôle, font partie de la catégorie plus large des « demandes » visées par l’article 57 du RGPD.

S’agissant ensuite surtout de l’appréciation du caractère excessif de ces réclamations, la Cour de Justice rappelle d’abord que les personnes bénéficient d’un droit d’accès à leurs données, et que fixer un seuil chiffré absolu au-delà duquel des réclamations deviendraient automatiquement qualifiées d’excessives, pourrait porter atteinte à ce droit d’accès.

Dès lors, le nombre de réclamations introduites n’est pas, à lui seul, un critère suffisant pour caractériser un abus.

Pour caractériser une demande excessive ou infondée, il appartient donc à l’autorité de contrôle de démontrer que le nombre important de demandes formées s’explique non par la volonté de la personne concernée d’obtenir une protection de ses droits mais par une finalité autre, telle que par exemple entraver le bon fonctionnement de l’autorité de contrôle.

 

2/ Le libre choix de la réponse à apporter à une demande infondée ou excessive

 

Lorsqu’une demande est excessive ou infondée, le texte laisse la possibilité à l’autorité de contrôle d’exiger de la personne concernée le paiement de frais raisonnables basés sur les coûts administratifs ou de refuser de donner suite à la demande.

La Cour administrative autrichienne s’interrogeait sur le fait de savoir si ce choix était totalement libre pour l’autorité de contrôle.

La Cour de Justice rappelle que le texte ne comporte aucune hiérarchie entre les options laissées à l’autorité de contrôle.

Par conséquent, compte tenu de l’importance de la possibilité pour les personnes d’introduire des réclamations, il appartient aux autorités de prendre en compte toutes les circonstances pertinentes et de s’assurer du caractère approprié, nécessaire et proportionné de l’option choisie, sans qu’il ne puisse être imposé à l’autorité de privilégier dans un premier temps le paiement de frais par la personne demanderesse.

En résumé, le fait qu’une personne adresse un nombre important de réclamations à une autorité de contrôle n’est pas suffisant pour que ladite autorité refuse de donner suite à ses demandes.

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L’architecte peut-il s’opposer à la destruction ou la rénovation d’un bien immobilier ?

Avocat droit d'auteur NantesVous êtes un acteur du secteur immobilier ou un particulier, vous avez récemment acquis un bien et vous demandez si vous allez opter pour une rénovation ou pour une destruction totale ou partielle en vue d’une reconstruction à neuf ? Dans le cadre de cette réflexion, une question à se poser est celle de savoir si l’architecte de ce bâtiment peut s’opposer à ces opérations.

 

Un bien immobilier peut-il bénéficier de la protection conférée par le droit d’auteur ?

 

Lorsque l’on évoque le droit d’auteur on pense généralement à des peintures, sculptures, photographies, romans ou encore à des compositions musicales. En réalité, le droit d’auteur a un spectre beaucoup plus large, le Code de la propriété intellectuelle donnant à cet égard quelques exemples qui en témoignent (article L. 112-2) dont notamment les conférences, allocutions, cartes géographiques ou encore les logiciels.

Dans cette liste, sont par ailleurs précisément évoquées les œuvres d’architecture mais encore les plans ou croquis qui y sont relatifs.

Donc oui, un bien immobilier peut par hypothèse bénéficier de la protection conférée par le droit d’auteur, à une condition cependant : être original.

 

Protection conférée à condition d’originalité

 

Toute création, quelle que soit sa nature, doit répondre à la condition d’originalité pour bénéficier d’une protection par le droit d’auteur. Elle est habituellement reconnue quand il est démontré par l’auteur que sa création porte « l’empreinte de sa personnalité ». Il s’agira de sa « patte » rédactionnelle pour un ouvrage ou de son style dans le cadre d’œuvres plus graphiques.

Qu’est-ce que cela recouvre concrètement ? Il faut que l’auteur soit en capacité d’expliquer quels choix créatifs il a fait, quels étaient ses partis-pris esthétiques, sans que ceux-ci :

  • ne résultent quasi-exclusivement de contraintes du type PLU, topographie du terrain, contraintes dictées par les clients, etc. (exemple en ce sens pour un immeuble : Cour d’appel de Paris, 6 septembre 2023, n°21/03/848).
  • n’apparaissent comme banals au vu du domaine concerné et/ou tombés dans le domaine public (exemple en ce sens pour des verrières : Cour d’appel de Paris, 9 octobre 2024, n°22/20264). Il a déjà pu être considéré par exemple qu’une maison d’habitation était tout à fait originale au vu des développements de l’architecte, d’autant qu’elle avait été mise en avant dans une revue d’architecture.

La même condition s’appliquera également aux plans et croquis relatifs au bien, si l’architecte invoque des droits d’auteur sur ces derniers (exemple en ce sens pour des plans d’architecture paysagère : Cour d’appel de Versailles, 16 mai 2013, n°10/09724).

 

Des formalités sont-elles à réaliser par l’architecte pour invoquer des droits d’auteur ?

 

Contrairement au droit des marques ou des brevets par exemple, aucune formalité n’est requise pour que l’auteur d’une création bénéficie des droits sur cette dernière, tant qu’il démontre son originalité.

Cela signifie donc qu’il est investi des éventuels droits d’auteur sur ses plans, croquis ou encore sur son bâti, dès le jour de leur création.

L’idéal est donc que les parties puissent dialoguer, beaucoup de contentieux naissant d’une absence de communication.

 

Quels droits pour l’architecte sur son bien ?

 

L’architecte dispose sur ses plans, croquis ou sur son bien, s’ils sont originaux, de droits d’auteur qui se subdivisent en deux composantes distinctes :

  • des droits économiques/patrimoniaux : ces droits lui permettent de disposer d’un monopole sur l’exploitation de sa création, c’est-à-dire d’être le seul à pouvoir autoriser (le cas échéant moyennant contrepartie financière) ou interdire toute reproduction de cette dernière, quel que soit le support utilisé (ex : copier une maison pour en faire une seconde, utiliser l’image d’un bien original pour vendre des cartes postales ou en faire des produits dérivés).

Ces droits durent, sauf tempéraments, de la création du bien et pendant un délai de 70 ans après le décès de l’architecte.

  • des droits moraux : ces droits lui permettent d’exiger que son nom soit associé à toute reproduction de sa création mais également de s’opposer à toute modification, altération ou destruction par exemple de son bien immobilier en invoquant le droit au respect de sa création (article L. 121-1 du Code de la propriété intellectuelle).

Les droits moraux sont imprescriptibles.

Ces droits, et précisément ici le droit moral, semblent donner à l’architecte un pouvoir important sur le devenir de son bien immobilier et ses éventuels propriétaires successifs.

Ceci étant, en matière juridique, tout est souvent question de balance entre les intérêts et droits des parties en présence.

Or, le propriétaire d’un bien immobilier a un droit de propriété sur ce dernier, lui donnant le pouvoir d’en disposer de la manière la plus large, en ce compris le droit de le détruire, de le rénover, de l’agrandir (sous réserve également du respect des règles d’urbanisme et d’éventuelles servitudes).

Vous l’aurez compris, en réalité tout est question de cas concret et de savoir où mettre le curseur dans la balance entre ces droits fondamentaux afin de permettre une cohabitation dans des situations parfois tendues. La nuance est ici de mise.

 

Comment droit de propriété et droit d’auteur sont conciliés en pratique ?

 

La conciliation de ces deux droits fondamentaux n’est pas chose aisée mais une jurisprudence abondante est venue éclairer d’un point de vue pratique le sujet en vue de tenter de concilier tant les intérêts des architectes que ceux des propriétaires de biens immobiliers.

Ainsi, l’architecte ne peut imposer l’intangibilité du bien qu’il a conçu et le propriétaire ne peut de son côté procéder qu’à des modifications qui n’excèdent pas ce qui est strictement nécessaire au but poursuivi et qui ne paraissent donc pas disproportionnées.

Quelques exemples dans lesquels la balance a été favorable aux propriétaires de biens :

  • Lorsque le grand public a eu suffisamment de temps pour contempler le bien et en profiter,
  • Lorsqu’il est justifié d’un intérêt supérieur comme par exemple un besoin de relogement ou encore des considérations relevant de la sécurité publique,
  • Lorsque l’immeuble n’est pas classé au titre des monuments historiques,
  • Lorsque l’alternative à la démolition proposée n’est pas satisfaisante,
  • Lorsque le bâtiment a une fonction utilitaire et non esthétique.

Il est donc essentiel, avant toute destruction ou modification d’un bien dont vous seriez propriétaire, de vous poser la question d’éventuels droits de propriété intellectuelle qui pourraient porter sur ce dernier, au bénéfice de l’architecte qui l’a conçu.

 

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La renommée de la marque ABBA reconnue par l’EUIPO

Avocat droit des marques NantesDans une décision du 4 février 2025 (B 3 148 086), la division d’opposition de l’EUIPO a eu l’occasion de se prononcer dans le cadre d’une opposition du titulaire de la marque internationale antérieure « ABBA » (la maison de disque du célèbre groupe suédois de musique éponyme) à l’encontre de l’enregistrement de la marque européenne « Viña ABBA » déposée pour des « Boissons alcoolisées à l’exception des bières » en classe 33.

 

Contexte : la marque de l’UE « Viña ABBA » avait été déposée pour de l’alcool en classe 33 et la maison de disque du groupe ABBA s’était opposée à son enregistrement

 

Une société portugaise productrice de vin, avait déposé le 28 janvier 2021 la marque européenne « Viña ABBA » pour désigner des boissons alcoolisées à l’exception des bières en classe 33.

La maison de disque suédoise, ayant notamment enregistré les trois derniers albums studio du groupe ABBA et titulaire de la marque internationale antérieure « ABBA » avait formé opposition à l’encontre de ce dépôt. Faute de pouvoir opposer des droits sur sa marque pour les boissons alcoolisées suite à une décision d’annulation, elle soutenait que sa marque bénéficiait d’une renommée lui permettant néanmoins de s’opposer à l’enregistrement de la marque litigieuse pour les produits en classe 33.

Saisi de cette opposition, l’EUIPO a été amené à se prononcer sur cette opposition fondée sur l’article 8,5) du Règlement UE 2017/1001 sur la marque européenne qui précise : «  sur opposition du titulaire d’une marque antérieure enregistrée […], la marque demandée est refusée à l’enregistrement si elle est identique ou similaire à une marque antérieure, indépendamment du fait que les produits ou services pour lesquels elle est demandée sont identiques, similaires ou non similaires à ceux pour lesquels la marque antérieure est enregistrée, lorsque cette marque antérieure est une marque de l’Union européenne qui jouit d’une renommée dans l’Union ou une marque nationale qui jouit d’une renommée dans l’État membre concerné, et que l’usage sans juste motif de la marque demandée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de cette marque antérieure ou leur porterait préjudice. »

 

Solution : l’opposition est justifiée et la demande d’enregistrement de la marque européenne est totalement rejetée

 

Selon l’EUIPO, la marque antérieure possède un degré élevé de distinctivité acquise grâce à sa renommée. La marque bénéficie d’une forte renommée, et les signes en cause présentent des similitudes notables, avec au moins un degré moyen de ressemblance visuelle et auditive.

L’élément commun « ABBA », bien que dénué de sens en soi, est, selon l’office, désormais associé par le grand public aux enregistrements du groupe musical éponyme. Les consommateurs qui reconnaissent ce terme dans le signe contesté le feront en raison de la notoriété de la marque antérieure, générant une association immédiate avec cette dernière.

Compte tenu de la forte notoriété du signe antérieur et des similitudes entre les signes, notamment lorsque la marque antérieure est entièrement contenue dans le signe contesté, il est probable que celui-ci évoque la marque renommée, notamment en lien avec les boissons alcoolisées.

Les consommateurs pourraient ainsi établir un « lien » mental entre les signes, influençant leur comportement d’achat en faveur des produits commercialisés sous le signe contesté. La requérante bénéficierait ainsi de l’image positive de la marque antérieure sans supporter les coûts de promotion habituels.

En conclusion, l’utilisation de la marque contestée permettrait à la requérante de tirer indûment profit de la renommée de la marque antérieure, détournant ainsi sa puissance commerciale au détriment de cette dernière, dans l’ensemble de l’Union européenne. Partant de là, l’opposition est jugée justifiée.

 

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Contrefaçon de brevet : difficile d’invoquer la possession personnelle antérieure

Avocat droit des brevetsDans un jugement du 10 octobre 2024, le Tribunal judiciaire de Paris s’est penché, dans le cadre d’une action en contrefaçon de brevet, sur la validité de celui-ci et sur l’exception de possession personnelle antérieure qui était opposée par les défenderesses.

 

Contexte : la commercialisation jugée contrefaisante de câbles brevetés

 

Dans cette affaire, une société spécialisée dans la fabrication de câbles était titulaire d’un brevet européen nommé « Câble électrique comprenant une isolation en polyoléfine expansée et son procédé de fabrication », issu d’une demande internationale PCT déposée en 2005.

Estimant que des sociétés concurrentes contrefaisaient la partie française de son brevet européen, le titulaire du brevet les a assignées en contrefaçon.

 

Solution : le rejet des arguments soulevés en défense et la condamnation pour contrefaçon

 

Le débat sur la validité du brevet litigieux

 

Les sociétés défenderesses opposaient au titulaire du brevet la non-validité de celui-ci eu égard au défaut de nouveauté et d’activité inventive, selon elles.

S’agissant du caractère nouveau du brevet, les défenderesses avançaient que les caractéristiques des revendications du brevet avaient déjà été divulguées car mises sur le marché par elles avant le dépôt dans le cadre d’une production industrielle massive de câbles, ce qui écartait toute nouveauté.

Le Tribunal rappelle que pour remettre en cause la nouveauté d’un brevet, l’invention doit avoir été rendue accessible au public, à une date certaine antérieure au dépôt de la demande de brevet, et divulguée toute entière, avec les mêmes éléments, dans la même forme, le même agencement et le même fonctionnement en vue du même résultat technique.

En l’espèce, le Tribunal a considéré que les défenderesses ne parvenaient pas à démontrer qu’elles avaient effectué une production massive de leurs câbles depuis le début des années 2000 et donc des ventes massives. Cela n’était corroboré par aucun document comptable, facture, bon d’expédition ou encore déclaration de client. En conséquence, rien ne permettait de démontrer que les éléments en cause avaient été rendus accessibles au public.

S’agissant de la prétendue absence d’activité inventive, le Tribunal a considéré que les documents d’art antérieur opposés, constitués de brevets antérieurs, ne permettaient pas d’établir que l’invention litigieuse était évidente aux yeux d’une personne du métier.

La validité du titre a donc été retenue en l’espèce.

 

Le rejet de l’exception tirée de la possession personnelle antérieure

 

Pour échapper à la contrefaçon, les défenderesses se prévalaient de l’exception de possession personnelle antérieure de l’invention, posée par l’article L. 613-7 du Code de la propriété intellectuelle.

Cet article dispose que : « Toute personne qui, de bonne foi, à la date de dépôt ou de priorité d’un brevet, était, sur le territoire où le présent livre est applicable en possession de l’invention objet du brevet, a le droit, à titre personnel, d’exploiter l’invention malgré l’existence du brevet ».

Cet article permet l’exploitation personnelle de l’invention et ce, malgré le brevet, si l’on est en mesure de rapporter la preuve que les conditions cumulatives suivantes sont remplies : une possession antérieure à la date du dépôt de la demande d’enregistrement de brevet ou à sa date de priorité (i), la possession d’une technique identique à l’invention brevetée (ii), sa localisation sur le territoire français (iii) et la bonne foi de celui qui revendique cette possession (iv).

En l’espèce, les juges ont estimé qu’il est en effet vraisemblable que les défenderesses aient effectué des recherches antérieures dans le domaine de l’invention brevetée, notamment cahiers de laboratoire à l’appui, mais ils ont toutefois considéré qu’elles ne démontraient pas que ces recherches avaient porté spécifiquement sur les caractéristiques de l’une des revendications du brevet (la taille des cellules), déterminante pour apprécier l’identité des techniques. Le Tribunal a donc conclu que les critères d’identité des techniques possédées et d’antériorité n’étaient pas réunis de sorte que l’exception de possession personnelle antérieure ne pouvait trouver application.

Constatant que les câbles mis sur le marché par les sociétés défenderesses reproduisaient les revendications du brevet, les juges ont donc conclu que la contrefaçon était établie et a interdit la fabrication et la commercialisation des câbles litigieux.

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