Concurrence déloyale en raison de mentions mensongères : c’est celui qui dit qui est

Avocat concurrence déloyale Nantes ParisDans un arrêt du 11 septembre 2024 (n°22/10609), la Cour d’appel de Paris a rendu une nouvelle décision sur des allégations trompeuses apposées sur des produits et concernant un prétendu brevet.

 

Contexte : des accusations mutuelles de comportements déloyaux

 

Le litige opposait deux sociétés commercialisant en France des pastilles de désinfection de l’eau.

L’une d’entre elles s’était vue attribuer un marché public par l’armée française à plusieurs reprises. L’autre lui reprochait de mettre en avant des propriétés mensongères de ses produits (tant en termes de dosage que d’efficacité contre des infections parasitaires).

Une action avait en conséquence été engagée devant le Tribunal de commerce de Paris.

Ce dernier l’ayant déboutée de ses demandes, la société demanderesse a formé appel, donnant lieu à la présente décision.

De manière reconventionnelle, la défenderesse soulevait notamment le fait que la demanderesse mettait en avant sur son site Internet et sur l’emballage de ses produits plusieurs informations qu’elle estimait déloyales.

 

Solution : des informations non trompeuses sur les produits mais sur l’existence prétendue d’un brevet

 

Une démonstration insuffisante de la déloyauté de la défenderesse

 

La société demanderesse reprochait tout d’abord, sur le fondement de pratiques déloyales et trompeuses, aux pastilles de sa concurrente de contenir en réalité un grammage de principe actif supérieur à celui indiqué, ce qu’elle estimait en sus dangereux pour la santé.

La Cour d’appel a toutefois relevé que la demanderesse ne démontrait pas une pratique de sa concurrente contraire à la diligence professionnelle quant à la quantité incriminée de principe actif, notant à cet égard que les rapports invoqués provenaient de son propre fournisseur et fabricant. Elle retient également qu’il n’est pas justifié de la dangerosité de la quantité de principe actif en cause ni de ce que la mention querellée aurait altéré substantiellement le comportement du consommateur concerné, à savoir l’administration des armées, puisque cette dernière ne s’était pas contentée des informations données mais avait analysé des échantillons des produits.

La société en question reprochait également à sa concurrente de mettre en avant une prétendue efficacité de ses pastilles contre des infections parasitaires alors, selon elle, que des études de l’OMS aurait démontré l’inefficacité de l’utilisation des principes actifs en cause contre celles-ci. En défense, une autre étude disant l’inverse était soumise aux débats.

Là encore toutefois, la Cour d’appel a considéré que la demanderesse échouait à démontrer en quoi son grief aurait constitué un manquement à une diligence professionnelle entraînant une altération substantielle du comportement du consommateur. Elle a également souligné qu’il ne lui appartenait pas de trancher les débats scientifiques sur le sujet.

 

La concurrence déloyale retenue à titre reconventionnel pour des allégations trompeuses du demandeur

 

En retour, la société défenderesse soulevait des agissements déloyaux et parasitaires de la part de la demanderesse.

La cour d’appel a tout d’abord considéré que ne caractérisaient pas des manquements mensongers ou des comportements déloyaux l’absence de certains pictogrammes sur les produits (présents sur leur emballage et notice) ni le fait de se prévaloir d’une autorisation obtenue par le Conseil supérieur d’hygiène publique en 1993, même si cet organisme ne délivre plus cette autorisation.

En revanche, est considéré comme déloyal le fait de faire référence, sur son site Internet, à un agrément de la Direction générale de la santé alors qu’il n’existe pas d’autorisation spécifique de cet organisme pour les comprimés en question.

De même, faire mentionner sur la fiche technique de ses produits « formule brevetée », sans justifier ni alléguer être détenteur ou licencié d’un brevet pour ledit produit, est considéré comme fautif, car une telle mention est un gage indu d’innovation et d’efficacité (cette solution est classique, et la cour d’appel de Paris avait déjà statué dans le même sens en 2022).

La Cour d’appel rappelle également que se prévaloir indument de la qualité de propriétaire d’un brevet peut donner lieu au paiement d’une amende spécifique prévue par le code de la propriété intellectuelle.

C’est donc finalement la demanderesse qui se voit condamnée à un retrait des produits portant les mentions incriminées et à un ajustement de son site Internet, sans toutefois devoir verser d’indemnité.

En résumé, il est déloyal de se prévaloir d’un brevet inexistant, puisque cela revient à tromper les consommateurs sur le caractère innovant de son produit.

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La marque LE CHAI pour des caves à vin jugée distinctive !

Avocat droit des marques NantesDans un arrêt récent du 7 juin 2024, la Cour d’appel de Paris s’est prononcée sur la question de savoir si la marque « LE CHAI » était distinctive pour désigner des « caves à vin réfrigérées ». 

 

Contexte : litige sur la distinctivité de la marque « LE CHAI » pour désigner des caves à vin

 

Dans cette affaire, la société SIDEME, spécialisée notamment dans la vente de caves de service, de conservation et de vieillissement du vin, a déposé le 17 septembre 2013 une marque verbale « LE CHAI » pour désigner les produits suivants en classe 11 : « caves à vin réfrigérées ».

Estimant que cette marque était dépourvue de caractère distinctif pour les produits visés, la société ADEVA, sa concurrente, a engagé une procédure en nullité à l’encontre de la marque « LE CHAI » devant l’INPI.

Par une décision du 20 février 2023, le directeur général de l’INPI n’a pas fait droit à ses demandes et a rejeté cette demande en nullité.

La société ADEVA a formé un recours à l’encontre de cette décision.

 

Solution : le terme « LE CHAI » jugé distinctif pour des caves à vin  

 

Le rappel de la notion de distinctivité comme condition de la protection par le droit des marques

 

Pour rappel, un signe, pour bénéficier de la protection offerte par le droit des marques, doit être d’une part disponible et d’autre part distinctif pour les produits et services qu’il vise. Cette notion de « distinctivité » signifie que la marque doit permettre aux consommateurs d’identifier l’origine des produits et services proposés et de les distinguer de ceux d’autres entreprises. La marque doit ainsi remplir un rôle de ralliement de clientèle. Le signe qui la compose ne doit donc pas être « descriptif » du produit ou du service, c’est-à-dire ne pas être la désignation « nécessaire, générique ou usuelle » de celui-ci ou du secteur d’activité, dans le langage courant ou professionnel.

En l’espèce, la société ADEVA soutenait que la marque « LE CHAI » était descriptive pour des caves à vin et ne remplissait en conséquence pas la fonction essentielle d’une marque, aux motifs que le terme « chai » désigne le lieu de la vinification et de la conservation du vin et qu’il a donc la « même nature et la même fonction » que les caves à vin, qui sont des lieux d’entreposage et de conservation du vin.

Selon elle, ce terme, relevant du vocabulaire courant de la viniculture et étant destiné à être compris par les amateurs de vin et les professionnels du monde du vin, était donc absolument descriptif des produits visés dans le dépôt.

Ce n’est pourtant pas la position retenue par les juges dans ce cas précis.

 

L’interprétation large de la distinctivité par les juges en l’espèce

 

En l’espèce, la Cour compare les définitions des termes « chai » et « caves à vin réfrigérées » pour déterminer si les deux termes revêtent effectivement la même définition. Elle en déduit que le terme « chai » désigne le lieu de la vinification et de la conservation du vin, de la prise en charge de la récolte de raisin jusqu’à la mise en bouteille, alors que les « caves à vin réfrigérées » désignent des objets relevant de la catégorie des appareils électroménagers dans lesquels sont entreposées les bouteilles pour leur conservation.

Elle conclut que si ces termes sont tous deux issus du monde du vin, ils ne désignent pour autant pas les mêmes produits et « ne partagent ni la même nature ni la même fonction ».

En conséquence, la Cour d’appel retient que le signe « LE CHAI » est distinctif pour désigner des caves à vin et confirme la décision du directeur général de l’INPI en ce qu’elle a rejeté la demande en nullité.

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Droit d’auteur et jeux vidéo dématérialisés : game over pour l’épuisement des droits

Avocat droit d'auteur Nantes Dans un arrêt du 23 octobre 2024, la première chambre civile de la Cour de cassation s’est prononcée sur l’application ou non de la règle de l’épuisement des droits de propriété intellectuelle aux jeux vidéo distribués uniquement sous forme dématérialisée.

 

Contexte : le combat d’une association de consommateurs contre les conditions d’utilisation de la plateforme Steam

 

Une société américaine propose, via la plateforme Steam, un service de distribution de contenus numériques, dont des jeux vidéo téléchargeables sur les ordinateurs des utilisateurs. Avant tout téléchargement, ces derniers doivent accepter un « Accord de souscription Steam » prévoyant notamment l’interdiction de la revente des contenus et le transfert de comptes Steam.

Une association de consommateurs (UFC – Que choisir) a formé une action en justice contre la société américaine (et sa filiale luxembourgeoise), considérant que cette clause devait être considérée comme abusive et lui reprochait de caractériser une restriction à l’épuisement des droits de propriété intellectuelle sur le contenu.

Le Tribunal judiciaire de Paris, en 2019, avait considéré qu’un certain nombre de clauses de ce contrat devaient être considérées comme abusives et/ou illicites, et donc être réputées non-écrites. En appel, la Cour d’appel de Paris avait considéré, en 2022, que les jeux vidéo n’étant pas de simples logiciels, le régime à appliquer n’était pas celui spécifique aux logiciels mais le régime général du droit d’auteur. Elle avait en conséquence rejeté la demande de question préjudicielle à la CJUE de l’association de consommateurs et tranché directement la question.

Cette dernière a donc formé un pourvoi en cassation.

 

Solution : pas d’épuisement du droit de distribution sur un jeu vidéo sans support physique

 

L’inapplicabilité du régime spécifique des logiciels aux jeux vidéo

 

Pour mémoire, dès lors que la première vente d’un ou des exemplaires matériels d’une œuvre a été autorisée par l’auteur ou ses ayants droit sur le territoire d’un Etat membre de la Communauté européenne ou d’un autre Etat partie à l’accord sur l’EEE, la revente des exemplaires ne peut plus être interdite sur ces territoires.

Toutefois, l’épuisement des droits diffère selon la nature de l’objet en question :

  • Pour une œuvre logicielle, il existe un épuisement dès lors que le titulaire de droits a autorisé, même gratuitement, le téléchargement d’une copie dématérialisée du logiciel : il ne peut alors plus empêcher la circulation de cette copie.
  • Pour toute autre œuvre, la jurisprudence de l’Union Européenne a déjà considéré (à propos des livres numériques) que l’épuisement ne s’applique pas aux œuvres mises sur le marché de manière dématérialisée : une copie dématérialisée ne peut alors pas être revendue sans l’autorisation du titulaire.

La Cour de cassation a rejeté le pourvoi de l’association de consommateurs.

En effet, les jeux vidéo ne sont, selon elle, pas uniquement des logiciels mais constituent un « matériel complexe » comprenant non seulement un programme d’ordinateur mais également des éléments graphiques et sonores qui ont « une valeur créatrice propre qui ne saurait être réduite au simple encodage ». Ainsi le régime spécial issu de la directive 2009/24 applicable aux seuls logiciels est ici sans effet.

 

L’application du régime général du droit d’auteur aux jeux vidéo

 

Selon la Cour de cassation, le jeu vidéo n’étant pas uniquement un logiciel à proprement parler et le régime issu de la directive 2009/24/CE étant une loi spéciale, c’est le régime général issu de la directive 2001/29 qui s’applique, d’autant que « à la différence d’un programme d’ordinateur destiné à être utilisé jusqu’à son obsolescence, le jeu vidéo se retrouve rapidement sur le marché une fois la partie terminée et peut, contrairement au logiciel, être encore utilisé par de nouveaux joueurs plusieurs années après sa création ».

La règle de l’épuisement ne s’appliquant pas aux œuvre mises sur le marché de manière dématérialisée, elle ne concerne donc pas les jeux vidéo dématérialisés. Ainsi, en l’absence de doute raisonnable quant à l’interprétation du droit de l’Union européenne, il n’y avait pas lieu de saisir la CJUE de la question préjudicielle de l’association de consommateur.

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Droit sui generis du producteur de base de données : Méta n’a pas les bases

Base de donnéesDans un arrêt du 1er mars 2024 (n° 23/10396), la Cour d’appel de Paris s’est prononcée sur la caractérisation des critères d’accès à la protection qu’offre le droit sui generis du producteur de bases de données.

 

Contexte : une reprise de données des réseaux sociaux Facebook et Instagram

 

Les réseaux sociaux Facebook et Instagram sont respectivement détenus par les sociétés de droit américain Meta Platforms Inc. et Instagram LLC et leurs services sont exploités en Europe par Meta Platforms Ireland.

La société The Phantom Company, quant à elle, conçoit, exploite et offre à la vente des logiciels d’extraction de données et de publication automatique de contenus, notamment sur les réseaux Facebook et Instagram.

Or, après ordonnance rendue sur requête, les deux sociétés américaines et la société irlandaise ont procédé, le 29 novembre 2022, à des opérations de saisie-contrefaçon dans les bureaux de la société Phantom, motif étant pris, notamment, que cette dernière porterait atteinte à leur droit sui generis de producteur de base de données.

Le 26 décembre suivant, la société Phantom a assigné en référé les trois sociétés à l’initiative de la saisie-contrefaçon dont elle a fait l’objet, aux fins d’obtenir la mainlevée des opérations effectuées au titre de cette saisie et la rétractation de l’ordonnance l’ayant autorisée. Ces demandes ont été rejetées par l’ordonnance de référé.

Dès lors, la société Phantom interjette appel de cette décision, en faisant notamment valoir que les intimés étaient irrecevables à agir sur le fondement du droit sui generis du producteur des bases de données.

 

Solution : la protection par le droit des producteurs de bases de données est subordonnée à un rattachement à l’UE et à la preuve d’un investissement

 

Les deux sociétés américaines sont irrecevables à agir faute d’avoir la qualité de ressortissant d’un Etat membre de l’Union européenne, ou d’y exercer leur activité

 

Alors que l’article L. 341-1 du Code de la propriété intellectuelle pose le principe de la protection du producteur d’une base de données, l’article L. 341-2 du même code limite le bénéfice de cette protection à deux catégories de personnes :

1) Celles qui ressortissent d’un Etat membre de l’Union européenne, ou d’un Etat partie à l’accord sur l’Espace économique européen, ou qui ont leur résidence habituelle dans un tel Etat ;

2) Celles qui ont leur siège statutaire, leur administration centrale ou leur établissement principal à l’intérieur de l’Union européenne ou d’un Etat partie à l’accord sur l’Espace économique européen.

Forte de ce texte, la société appelante demandait à la Cour d’appel de déclarer irrecevables les deux sociétés américaines à agir sur le fondement du droit sui generis du producteur de bases de données.

Ce moyen, qui ne souffrait guère la contestation, n’a même pas été discuté par les sociétés intimées. La Cour l’a avalisé dans un considérant aussi laconique que lapidaire en affirmant que : « En application de l’article L. 341-2 suscité, il convient de déclarer irrecevables à agir sur le fondement du droit suis generis du producteur de bases de données les deux sociétés américaines n’ayant ni leur siège social, ni leurs activités dans un Etat de l’Union Européenne ».

 

La société irlandaise est irrecevable à agir faute de démontrer sa qualité de producteur de base de données

 

Restait toujours la société irlandaise, qui semblait, à première vue, plus susceptible de voir ses demandes prospérer. C’est ici la qualité même de producteur de base de données qui lui a été refusée.

La société appelante invoquait ici l’article L. 341-1 du Code de la propriété intellectuelle qui dispose en son premier alinéa que : « Le producteur d’une base de données, entendu comme la personne qui prend l’initiative et le risque des investissements correspondants, bénéficie d’une protection du contenu de la base lorsque la constitution, la vérification ou la présentation de celui-ci atteste d’un investissement financier, matériel ou humain substantiel ».

Il appartenait donc à la la société irlandaise de démontrer en quoi elle avait : « pris l’initiative et le risque d’un investissement financier, matériel ou humain substantiel pour la constitution, la vérification ou la présentation du contenu de la base de données » (cf. pour plus de détails notre fiche pratique sur les « Comment protéger une base de données ? »)

Pour prouver son rôle de producteur de la base de données en question, la société irlandaise n’a présenté que deux documents : un examen des indicateurs clés de performance, portant sur le chiffre d’affaires, le coût des ventes et les dépenses administratives, et une attestation de son directeur affirmant que l’entreprise réalise des investissements financiers et matériels importants pour fournir les services de Facebook et Instagram en Europe.

Face à cette pauvreté probatoire, la Cour d’appel de Paris refuse également la qualification de producteur de base de données à la société irlandaise.

Partant, la Cour d’appel de Paris fait droit aux demandes de la société appelante et ordonne la mainlevée des opérations de saisie-contrefaçon.

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Contrefaçon de droit d’auteur

Avocat droit d'auteur NantesVous avez créé un jeu de société, écrit un ouvrage, créé une scénographie ou un logo, développé une solution logicielle, dessiné des plans d’architecture ou pris une superbe photographie, designé un meuble ou des vêtements aux caractéristiques particulières, et vous demandez comment réagir en cas de reprise/copie par un tiers ?

 

Concrètement, si vous bénéficiez de la protection offerte par le droit d’auteur, vous êtes à même d’opposer vos droits à toute personne ayant utilisé ou reproduit votre création sans votre autorisation, cette dernière se rendant alors coupable de contrefaçon de droit d’auteur.

 

En amont, s’assurer de la protection de sa création par le droit d’auteur

 

Toutes les créations de l’esprit – que ce soit les livres, les œuvres de théâtre, de cinéma, les compositions musicales, un dessin, une peinture, des plans d’architecte, ou même les logiciels – peuvent être éligibles à la protection par le droit d’auteur du seul fait de leur création.

 

La seule condition à cette protection est que l’œuvre soit « originale ». Les juges entendent par là que la personne qui revendique des droits sur une création – le titulaire des droits – doit être en mesure de démontrer qu’il a fait preuve de choix créatifs, libres et non contraints, emprunts de sa personnalité propre dans la création de son œuvre. Le critère est subjectif et laissé à l’appréciation des juges qui seront amenés à trancher la question lors d’un conflit devant les tribunaux. Il s’agit concrètement par exemple dans le cadre d’un livre de pouvoir démontrer « sa patte » ou dans une peinture son « coup de crayon » spécifique. Pour un logiciel, le critère est apprécié plus techniquement et il faut prouver « un effort personnalité, allant au-delà de la simple mise en œuvre d’une logique automatique et contraignante ».

 

Bien entendu, pour qu’il y ait protection, il faut que la création ait été mise en forme et ne pas en être uniquement au stade de l’idée, à défaut de quoi toute personne pourrait s’approprier des droits sur une idée ou un concept, ce qui n’est juridiquement pas possible.

 

Quelle protection offre le droit d’auteur ?

 

Contrairement à d’autres droits de propriété intellectuelle, le bénéfice du droit d’auteur est automatique dès lors que l’œuvre est originale. Cette protection ne nécessite donc pas de dépôt devant un office ou l’ajout de la mention du © sur vos créations pour leur assurer une protection.

 

La protection par le droit d’auteur confère à son titulaire des droits pour la durée de sa vie et à ses ayants droits pendant 70 ans après son décès.

 

Le titulaire disposera alors d’un monopole d’exploitation sur son œuvre qui lui confère le droit exclusif d’autoriser ou d’interdire notamment la reproduction et la représentation non autorisées de son œuvre sur tout support par des tiers.

 

A noter que tout l’enjeu en droit d’auteur consiste à rapporter la preuve de la paternité de son œuvre à un moment donné. Il est donc essentiel de conserver toutes les versions de son travail et de faire un dépôt probatoire de la création par exemple auprès de l’INPI (dépôt e-soleau) ou d’un huissier afin de donner date certaine à sa création (un dépôt auprès de l’agence pour la protection des programmes peut être réalisé pour des logiciels).

 

Contrefaçon de droit d’auteur : de quoi parle-t-on ?

 

Comme indiqué, la protection par le droit d’auteur confère à l’auteur un monopole qui lui permet de s’opposer à tout tiers qui utiliserait son œuvre sans autorisation, se rendant ainsi coupable de contrefaçon.

 

Par exemple, il pourra s’opposer à :

 

  • l’adaptation de son roman en film,
  • la copie de la charte graphique ou des contenus de son site internet par un concurrent,
  • la copie de ses plans d’architecture ou précisément la réalisation d’une maison sur la base desdits plans,
  • la modification du logo qu’il a préparé pour son client par une autre agence que la sienne,
  • la vente de produits vestimentaires par un concurrent qui reprennent les siens,
  • la diffusion sur des affiches ou en ligne de ses photographies
  • la copie des codes source de l’application qu’il a développée, avec lesquels est reparti un ancien salarié.

 

En outre, en droit d’auteur, tout ce qui n’est pas expressément autorisé formellement par écrit, avec mention de la durée de concession, du territoire, et surtout du périmètre de droits cédés, est formellement interdit. Toute personne outrepassant les termes d’un contrat de licence l’autorisant à utiliser une œuvre selon un mode d’exploitation précis, pour une durée et un territoire précis, est de facto contrefactrice.

 

Comment réagir en cas d’atteinte à vos droits ?

 

Se réserver la preuve de la contrefaçon de droits d’auteur

 

Concrètement, si vous vous apercevez qu’un tiers se rend coupable d’actes de contrefaçon, il est vivement conseillé de vous constituer des preuves irréfutables en amont de toute démarche. Pour ce faire, plusieurs options sont possibles du type faire diligenter un constat d’huissier en ligne ou sur les lieux de la contrefaçon ou encore faire réaliser une saisie-contrefaçon au sein des locaux de l’entreprise suspectée d’être contrefactrice, après autorisation du juge.

 

La phase amiable par envoi d’une mise en demeure

 

Une fois la preuve des agissements illicites conservée, il faudra envisager (sauf urgence absolue) la préparation et l’envoi d’un courrier de mise en demeure au contrefacteur, l’enjoignant de cesser les actes de contrefaçon et, selon les cas, de détruire les produits litigieux, de dédommager le préjudice subi, rembourser les frais d’avocat engagés, etc.

 

L’action judiciaire en contrefaçon devant les tribunaux

 

A défaut de réponse satisfaisante, il sera alors temps d’intenter une action en justice devant le tribunal judiciaire compétent afin de demander cessation des actes litigieux et d’obtenir réparation du préjudice subi. Il faut savoir qu’en matière de contrefaçon de droit d’auteur, seuls les tribunaux judiciaires sont compétents (pas les tribunaux de commerce) et seuls certains le sont (ex : Paris, Rennes, etc.).

 

Et en cas d’atteinte à vos droits moraux ?

 

La contrefaçon évoquée ci-dessus concerne l’atteinte aux droits que l’on appelle « économiques ».

 

Ceci étant, en tant créateur, vous bénéficiez aussi de droits moraux, dont l’atteinte peut également être sanctionnée.

 

Les droits moraux sont notamment le droit d’exiger que son nom soit précisé dans les utilisations de l’œuvre, le droit de décider si l’on souhaite divulguer ou non son œuvre ou encore le droit d’exiger le respect et l’intégrité de son œuvre.

 

Quelques exemples de litiges qui peuvent survenir :

 

  • adaptation d’un roman en film qui dénaturerait la fin de l’histoire et réinventera la vie des personnages,
  • utilisation d’extraits de films dans un clip de campagne pour un parti dont on ne partage pas du tout les convictions,
  • recadrage d’une photographie qui remettrait en cause la manière dont le photographe « voyait» le sujet photographié et souhaitait fixer son image,
  • destruction d’une œuvre architecturale ou réfection d’une manière dont l’architecte considère que cela porte atteinte à son intégrité.

 

Les autres protections également envisageables

 

Le droit des marques

 

Il est possible que votre création, par exemple votre logo, remplisse également les conditions de la protection par le droit des marques (constituer un signe distinctif capable d’être compris comme l’indication de l’origine commerciale des produits et services visés par la marque, être licite, disponible c’est-à-dire qu’il n’existe pas déjà de droits antérieurs similaires ou identiques pour des produits et services similaires ou identiques détenus par un tiers). Dans ce cas il est possible de coupler la protection par le droit d’auteur à un dépôt de marque qui vous permettra de vous baser sur un titre de propriété industrielle à opposer à des tiers exploitant leur activité sous un signe proche créant un risque de confusion avec le vôtre.

 

Le droit des dessins et modèle

 

De même, votre création, par exemple un modèle de vêtement ou de flacon de parfum, peut être protégé par un dépôt à titre de dessin et modèle. Celui-ci protègera l’apparence extérieure du produit, tels que ses lignes, contours, couleurs, formes, texture, motifs etc.

 

L’action en concurrence déloyale

 

Il est également tout à fait envisageable de coupler une action en contrefaçon par une action au titre de la concurrence déloyale, sur le terrain de la responsabilité pour faute. Cette action a l’avantage de ne pas être conditionnée à l’existence de droits privatifs, elle est donc pertinente exemple dans l’éventualité où le tribunal dénierait toute originalité à l’œuvre en question. Est ainsi sanctionné le fait de commercialiser des copies serviles de produits de concurrents, lorsqu’il en résulte un risque de confusion dans l’esprit du consommateur.

 

De nombreuses pistes de protection s’offrent donc à vous si vous êtes victime de contrefaçon de droit d’auteur !

 

Le Cabinet vous accompagne si vous souhaitez des conseils en matière de droits d’auteur.