La cour d’Appel de Paris préfère les burgers aux pizzas : la marque Giant validée

Avocat droit des MarquesPar un arrêt du 14 avril 2015, la Cour d’appel reconnait la distinctivité de la marque GIANT, supprime la marque de son concurrent, puis prononce la condamnation de ce dernier sur le terrain du droit des marques ainsi que sur le terrain de la concurrence déloyale.

 

La société QUICK est titulaire de la marque internationale GIANT, désignant notamment les classes de produits alimentaires, depuis 2006. En 2011, la société SODEBO a déposé, pour des produits identiques, la marque « PIZZA GIANT SOBEBO ». Estimant que cette marque portait atteinte à ses droits, la société QUICK a assigné SODEBO en contrefaçon et en concurrence déloyale. En retour, SODEBO invoquait la nullité de la marque « GIANT » pour défaut de distinctivité.
Pour justifier sa demande de nullité, SODEBO prétendait que la marque GIANT était descriptive car mettait en exergue les qualités du produit proposé sous cette marque. Les premiers juges ont donné raison à la société SODEBO et ont prononcé la nullité de la partie française de la marque internationale « GIANT », considérant que cette dernière n’était pas distinctive, le terme « GIANT » étant largement compris du public français comme signifiant « géant » ou « énorme », ce qui était descriptif des caractéristiques des produits et n’était dès lors pas distinctif. La société QUICK a fait appel de cette décision et la Cour d’Appel de Paris, dans son arrêt du 14 avril 2015, devait donc se prononcer sur la distinctivité de la marque « GIANT ».
La Cour d’appel est venue infirmer le jugement du TGI et a considéré que la marque « GIANT » était arbitraire et distinctive et conférait « une image positive à ses produits et services », sans informer directement le consommateur de l’une de leurs caractéristiques.

Copropriété quand tu nous tiens : l’incontournable recours au juge en cas de blocage d’un copropriétaire pour la conclusion d’un contrat de licence

Avocat brevetAux termes de l’article L613-29 du Code de la propriété intellectuelle, l’autorisation de tous les copropriétaires est nécessaire pour accorder une licence d’exploitation exclusive sur un brevet en copropriété. Seule une autorisation judiciaire peut passer outre le refus injustifié d’un des copropriétaires. Le Tribunal de grande instance de Paris a eu l’occasion de rendre une décision sur le sujet. Rares sont les décisions en la matière et il convient donc de s’arrêter sur cette dernière.

Un brevet était la copropriété de trois titulaires.
Un projet de contrat de licence d’exploitation exclusive a été négocié par deux des titulaires. Le troisième titulaire du brevet refusé de la signer. Pour passer outre son refus, les deux autres titulaires l’ont assigné devant le tribunal de grande instance de Paris.
Le Tribunal de Grande Instance de Paris devait donc déterminer si le refus du troisième titulaire était justifié ou non. Dans son jugement du 20 mars 2015, le TGI a estimé que les motifs de refus du copropriétaire n’étaient ni sérieux ni fondés.
Le défendeur reprochait notamment d’une part au projet de contrat d’être trop large en termes d’application et de portée territoriale et critiquait d’autre part les modalités financières du projet, qui, selon lui, étaient trop basses et lui causeraient un manque à gagner.
Sur le premier point, le TGI de Paris a considéré que les risques pesant sur le licencié, compte-tenu du stade peu avancé du développement de l’invention, justifiait l’exclusivité accordée à ce dernier, tant sur les domaines d’application que sur la portée territoriale. S’agissant des modalités financières, le TGI a constaté que les taux de redevances prévus correspondaient aux standards de ce type de brevet et qu’il était par ailleurs prévu de renégocier ces modalités après obtention de la première autorisation de mise sur le marché. Enfin, le TGI a relevé que le licencié avait une obligation d’exploitation diligente du brevet et que le contrat de licence pouvait être résilié en cas de manquement. Les demandes du défendeur ont donc été rejetées et le TGI de Paris a donc autorisé les deux autres titulaires à conclure le contrat projeté.

Nom de domaine : condamnation d’un fan de Kombi reprenant la marque « Volkswagen » !

Avocat droit des MarquesIl est communément admis qu’un nom de domaine peut porter atteinte à une marque déposée si la preuve d’un risque de confusion est apportée. A côté des procédures judiciaires dites classiques, l’ICANN a instauré une procédure baptisée UDRP afin de régler, de manière plus rapide et moins coûteuse, les éventuels litiges portant sur certains noms de domaine. L’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI), dans la décision étudiée, nous donne un aperçu intéressant des critères appliqués dans ce cadre.

En l’espèce, un passionné de la marque de véhicule VOLKSWAGEN avait réservé un nom de domaine incluant cette marque, aux fins de créer un blog relatif à la restauration, volkswagen.kiwi. Au moment de l’introduction de la la procédure, ce blog n’avait cependant pas été créé et VOLKSWAGEN invoquait la mauvaise foi du défendeur lors de la réservation du nom de domaine.
Pour prendre sa décision, l’OMPI a pris trois critères en considération : la comparaison des signes, le droit ou l’intérêt légitime du défendeur, ainsi que la bonne ou mauvaise foi de ce dernier lors de l’enregistrement du nom de domaine.
Les deux premiers critères étant aisément remplis, le cœur de la discussion portait sur l’appréciation de la bonne ou mauvaise foi du déposant.
Dans sa décision du 5 février 2015, constatant d’une part que le nom de domaine litigieux n’était pas exploité et que le défendeur ne présentait pas assez d’éléments démontrant qu’il allait le faire et que, un tel usage de la marque à l’identique était, quoiqu’il en soit, susceptible d’empêcher le plaignant de contrôler sa présence sur Internet, l’OMPI a, malgré l’apparente bonne foi du plaignant, décidé d’ordonner l’annulation du nom de domaine litigieux.

Sachez réagir face à des actes de contrefaçon

Avocat droit des marques NantesL’un de vos concurrents utilise votre marque, logo ou encore l’une de vos créations sans votre autorisation ou au-delà du périmètre accordé par vous. Vous êtes pour la première fois face à un acte de contrefaçon de l’un de vos droits privatifs. Voici les quelques clés pour agir vite et efficacement.

Avant toute action, assurez-vous de la validité de vos droits.
Pour pouvoir prétendre à une protection, il convient tout d’abord d’être bien titulaire de droits de propriété intellectuelle. Deux types de droits peuvent être contrefaits :

  • les marques, dessins-modèles ou encore brevets qui font l’objet d’un enregistrement auprès d’un office administratif de type INPI. Assurez-vous que vos titres sont bien à jour, que vous avez notamment procédé à leur renouvellement le cas échéant, mais également qu’ils sont suffisamment solides afin d’éviter leur annulation par un juge à la suite d’une action en réaction de la partie adverse dans le cadre d’un contentieux éventuel ;
  • les droits d’auteur sur une création esthétique ou logicielle (logos, logiciels, présentation de vos catalogues, charte graphique de votre site internet par exemple) qui naissent du seul fait de leur matérialisation, aucune formalité d’enregistrement n’étant exigée. Il convient toutefois que cette œuvre soit « originale », à savoir qu’elle porte l’empreinte de la personnalité de son auteur et que vous disposiez de la preuve d’une date certaine de création. Seul un juge, dans le cadre d’un contentieux, confirmera que votre œuvre est bien originale et à ce titre protégeable.

Une fois assuré de la validité de vos droits, il est fortement recommandé de se réserver la preuve de l’atteinte.

Réservez-vous la preuve des actes de contrefaçon.
La contrefaçon est un fait pouvant être prouvé par tout moyen, et la preuve est à votre charge. Voici les moyens de preuve les plus efficaces :

  • le constat d’huissier : il peut s’agir notamment d’un constat sur Internet ou d’un constat d’achat. L’huissier de justice décrit, dans son procès-verbal, les constatations matérielles effectuées relatives aux faits de contrefaçon ou encore relate un achat réalisé par un tiers, et les circonstances qui l’entourent. Un tel constat ne présente pas les mêmes conditions de réalisation selon qu’il concerne un lieu de vente physique (l’huissier reste sur la voie publique et décrit de l’extérieur, la vitrine du magasin ainsi que les objets de celui-ci remis par un tiers) ou virtuel (l’huissier procède au constat sur le site internet concerné : attention de simples impressions réalisées chez soi ne sont pas suffisamment probantes). Cette option peu coûteuse ne permet que l’obtention de la preuve de la contrefaçon et aucunement son étendue (préjudice, stocks détenus, etc.)
  • la saisie-contrefaçon est une méthode plus invasive et, à ce titre, doit être autorisée par Ordonnance du Président du Tribunal de grande instance à la suite d’une demande non-contradictoire présentée par requête. Elle permet à un huissier de se rendre dans les locaux du contrefacteur et d’y effectuer un large spectre de diligences allant de la simple description détaillée des produits contrefaisants ou des instruments ayant servi à leur fabrication jusqu’à la saisie réelle du stock litigieux. Il est également possible de récupérer des éléments sur le volume et le chiffre d’affaire réalisé avec les produits contrefaisants.

L’obtention de ces preuves sera essentielle pour la suite de la procédure, qu’elle soit amiable ou contentieuse.

Tentez la résolution amiable : la phase précontentieuse.
Préalablement à toute action en contrefaçon éventuelle, une lettre de mise en demeure est adressée au contrefacteur afin que l’atteinte cesse et que votre préjudice soit réparé. Dans ce cadre, une négociation peut s’engager avec le contrefacteur.
Cette option, plus rapide et moins coûteuse qu’un contentieux, reste toutefois tributaire de la réaction du contrefacteur. En l’absence de retour positif, seule la voie contentieuse reste ouverte.

En dernier recours, il reste l’introduction d’un contentieux.
Le dernier recours face à une contrefaçon est l’introduction d’un contentieux devant l’un des neuf tribunaux de grande instance compétents en matière de contrefaçon : Bordeaux, Lyon, Marseille, Lille, Nancy, Paris, Rennes, Nanterre et Fort-de-France.

En cas d’urgence (ex : intérêt à faire cesser rapidement les actes de contrefaçon), il est possible d’introduire une action dite « en référé ». Dans ce cadre, le juge rend rapidement une décision provisoire. Par la suite, une action dite « au fond » doit être menée afin de confirmer la décision entreprise.

La loi du 11 mars 2014 renforçant la lutte contre la contrefaçon, a amélioré l’évaluation du préjudice. En effet, pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend désormais en considération distinctement :

  •  les conséquences économiques négatives de la contrefaçon, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée,
  • le préjudice moral causé à cette dernière,
  • et les bénéfices réalisés par le contrefacteur, y compris les économies d’investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de la contrefaçon.

Des mesures d’interdiction de commercialisation, de destruction du stock litigieux et de publication du jugement à intervenir pourront également être demandées au Tribunal.

Inventions de salarié : pas de complément à la rémunération supplémentaire déjà versée

Avocat brevetAux termes de l’article L611-7 du Code de la propriété intellectuelle, l’inventeur salarié ayant participé à une invention dans le cadre d’une mission qui lui a été confiée, a droit au paiement d’une rémunération supplémentaire, indépendante de son salaire. Dans la présente affaire, le salarié avait déjà perçu des « primes brevet » et cherchait à obtenir un complément. Les juges l’ont débouté.

En l’espèce, un salarié employé au poste d’ « ingénieur recherche et développement de concepts pour la machinerie en nouveaux métaux » a procédé, entre 1987 et 2012, au dépôt de nombreux brevets d’invention de mission dont il est inventeur. A ce titre, il sollicitait un complément aux « primes brevet » qu’il avait touchées, estimant que son travail avait permis à l’entreprise de générer des bénéfices exceptionnels.

Le Tribunal de grande instance de Paris, dans un jugement du 15 janvier 2015, rejette ses demandes.

Concernant la prescription, les juges retiennent, fait rare, que le salarié avait les connaissances lui permettant de savoir, dès le dépôt des brevets, que ses inventions étaient des inventions de mission et d’estimer le montant de leur rémunération supplémentaire (à savoir, fonction de responsable du service recherche et développement, en charge de la gestion des brevets ; le salarié avait en outre réclamé et donné son accord pour des rémunérations supplémentaires par le passé, etc.).

Dès lors, les montants étant déterminables, la prescription court à compter des dépôts de brevets et ceux déposés plus de cinq ans (délai de prescription applicable à l’époque) avant l’assignation sont irrecevables.

Concernant la rémunération supplémentaire, le Tribunal relève qu’il n’est pas contesté que le salarié a touché une « prime brevet » pour chaque invention. Par conséquent, il considère que, pour éventuellement réévaluer ces primes qui s’assimilent à des rémunérations supplémentaires, il doit démontrer en quoi ses inventions ont généré un bénéfice exceptionnel pour l’entreprise. En l’absence d’une telle preuve, les primes versées sont jugées suffisantes et les demandes du salarié sont rejetées.

Dans cette affaire, les juges ont choisi de privilégier l’employeur qui avait prévu d’office des primes rémunérant les inventions de mission de son salarié. En effet, en l’absence d’éléments supplémentaires, les juges ont estimé ces primes suffisantes.

Il est donc vivement recommandé d’anticiper, dès le dépôt du brevet, les conditions de calcul et de versement d’une rémunération supplémentaire à ses inventeurs salariés. Cela permettra, d’une part, de rendre la rémunération déterminable et de faire courir le délai de prescription et, d’autre part, de rendre plus difficile pour le salarié la contestation de son montant.